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Ax
« Je n’ai jamais vraiment été fou, mis à part les fois où mon cœur a été touché. » Edgar Allan Poe
Cette citation vous parle peut-être. L’amour a cette capacité à faire ressortir le meilleur et le pire en vous. L’amour et la violence comportent d’ailleurs plusieurs similitudes, notamment dans leur caractère intense et souvent incontrôlable.
Laisser partir la personne qu’on aime est terriblement difficile. Une rupture vous amène inévitablement à remettre en question votre amour-propre. Certaines personnes n’arriveront jamais à lâcher prise.
Dans le cadre de mon travail dans le système judiciaire canadien, j’ai travaillé sur plusieurs cas de meurtres. L'”amour” se trouve plus souvent qu’autrement au cœur des drames les plus violents.
J’ai encore à ce jour du mal à comprendre que certaines personnes choisissent de tuer l’être aimé plutôt que d’accepter la fin d’une relation.
Ax n’est pas une chanson d’amour typique, mais c'en est une à sa façon.
La pièce a été mixée par Mark Lawson (Arcade Fire, Timber Timbre, Beirut, Owen Pallett) au studio qu’il partage avec Arcade Fire à Montréal. Elle a été enregistrée dans mon studio à la maison.
Perchaude
Perchaude parle de cette impression de n’avoir aucune emprise sur sa propre vie. L’histoire qui a inspiré la chanson sort tout droit d’un film hollywoodien. Pourtant, les événements se sont déroulés dans une prison près de Montréal qui n’a absolument rien de glamour.
En bref, un prisonnier entretenait une liaison secrète avec sa psychologue. Trouver l’« amour », ou ne serait-ce qu’une relation sexuelle consentante, relève du miracle en prison. L’homme était donc enchanté par toute cette situation... jusqu’à ce qu'elle ne tourne au vinaigre.
Les choses ont commencé à se compliquer lorsque le détenu apprit que la psychologue entretenait aussi une relation avec un gardien. Il obtenu cette information plusieurs mois après le début de l’aventure. Il se mit à paniquer. Il savait très bien à quel point sa vie deviendrait misérable si le personnel de la prison avait vent de sa liaison.
Il décida alors qu’il serait sage de prendre ses distances, mais la psychologue n’était pas du même avis. Elle souhaitait le garder dans sa charge de travail, si vous voyez ce que je veux dire. Évidemment, les évaluations de cette dernière sont d’une grande importance pour le détenu. Un rapport négatif pourrait grandement affecter ses chances de retrouver sa liberté. Elle se trouva donc avec une emprise totale sur le destin du prisonnier et commença à le manipuler.
Bien entendu, il s’agit de la version du prisonnier. S’agit-il de la vérité? Je n’en sais rien. Probablement pas complètement. Je n’ai pas eu l’occasion de voir l’autre côté de la médaille.
Si tout cette histoire peut paraître rigolote, je vous jure que c’était assez triste et pathétique d’entendre le détenu se lamenter. On pouvait vraiment sentir son profond sentiment d’impuissance. Le sentiment de n’avoir absolument aucun contrôle sur son propre destin. Je ne sais pas si j’ai ressenti de l’empathie pour cet homme, mais la difficulté de sa situation était tellement flagrante que cela m’inspira la chanson. La mouche sur fond gris qui fait guise de pochette me rappelle l'ambiance drabe des prisons canadiennes.
Une fois de plus, la pièce a été mixée par Mark Lawson (Arcade Fire, Timber Timbre, Beirut, Owen Pallett) au studio qu’il partage avec Arcade Fire à Montréal. Elle a été enregistrée dans mon studio maison.
Sophia
Deuxième single
La meilleure amie de Sophia n’était pas censée mourir ce soir là. Mais il était prévu qu’elle se fasse violer. Du moins, c’est ce qu’affirma son assassin lors de son audience de libération.
C’était mon travail d’accompagner Sophia au pénitencier et d’assister avec elle à cette audience. Elle ne pouvait cesser de trembler, incapable de contenir sa rage et ce sentiment de culpabilité qui l’habitait jour et nuit depuis maintenant 12 ans. Sophia s’en voulait à mort pour la fin tragique de sa meilleure amie. Pourtant, elle n’y était pour rien, mais elle refusait de l’accepter.
Sophia et sa meilleure amie étaient sorties ce soir là. La session universitaire venait tout juste de prendre fin et elles venaient tout juste de rentrer à la maison, en campagne, pour l’été. Après quelques verres dans un bar bondé de jeunes universitaires, trois hommes, fin vingtaine, les rejoignirent à leur table. Ils ne venaient pas célébrer la fin de session, mais c’était vendredi pour tout le monde. Ils s’amusèrent tous les cinq, quelques heures durant, à parler de tout et de rien. Les trois hommes s’étaient assurés que personne ne se retrouve à sec.
Sophia eut soudainement un mauvais pressentiment. Ce genre d’angoisse difficile à expliquer au moment où elle se manifeste. L’ambiance avait tourné d’un coup. Elle commençait à se sentir vulnérable. Ce sentiment de vulnérabilité, que malheureusement, trop de femmes connaissent trop bien. Ce sentiment que je n’ai jamais vécu. Ce sentiment que très peu d’hommes vivront.
Sophia emmena sa meilleure amie à l’écart et la supplia de rentrer avec elle. Cette dernière était pour sa part dans une forme olympique. Elle n’allait certainement pas laisser sa première soirée de vacance se terminer de la sorte. Sophia insista, mais son amie ne voulait rien entendre. Elle demanda gentiment à Sophia d’arrêter de paranoïer. Sophia se résigna alors à mettre son angoisse soudaine sur le dos de l’alcool et de la fatigue. Elle commençait à craindre les regards et les sujets de discussions des trois hommes, mais ils n’avaient “concrètement” rien fait de mal. Sophia rentra donc chez elle. Malgré la fatigue, elle n’arriva pas à fermer l’oeil de la nuit, incapable de chasser ses mauvaises pensées.
Le lendemain, vers midi, elle téléphona chez son amie pour savoir comment s’était terminée la soirée. C’est son père qui prit l’appel. Il n’avait pas eu de nouvelle et comptait bien sur Sophia pour lui indiquer où se trouvait sa fille. Sophia s’empressa alors de téléphoner à toutes ses amies. Pas de nouvelles. Un horrible mélange de panique et de culpabilité s'empara d’elle. Une sensation avec laquelle elle vit encore 12 ans plus tard.
C’est seulement le surlendemain que le corps à moitié dénudé de sa meilleure amie fût retrouvé au milieu d’un champ. Elle avait été séquestrée, violée et battue à mort. Les trois hommes avec qui elles avaient partagé un bon moment furent arrêté le jour même. Ils seront plus tard reconnus coupable du meurtre.
Dans cette chanson, c’est l’amie de Sophia qui lui demande de ne pas être trop dur envers elle même et qui s’excuse en quelque sorte de lui faire subir toutes ces émotions. Elle veut simplement entendre la voix de Sophia, qui depuis la tragédie, ne parle presque plus.
Nous ne savons pas ce que ressentent les morts. Mais je peux vous dire que la douleur de leurs proches est immense. Pour beaucoup d’entre eux, la culpabilité ne disparaîtra jamais.
La pièce a été mixée par Mark Lawson (Arcade Fire, Timber Timbre, Beirut, Owen Pallett) au studio qu’il partage avec Arcade Fire à Montréal. Elle a été enregistrée dans mon studio à la maison.
